A la découverte du « Far East »

Mercredi 5 juin 2019 – Une longue étape nous attend aujourd’hui, 660 km entre Omsk et Novossibirsk, entre l’Irtych et l’Ob.

La Sibérie que nous traversons depuis l’Oural a été découverte puis progressivement occupée par les Russes à partir de la fin du XVIe siècle. Les cosaques ont joué un rôle important dans l’expansion russe en Sibérie. Ce sont eux notamment qui ont fondé les premières villes en Sibérie Occidentale, par exemple Tobolsk que nous avons visité dimanche.  Au début du XVIIe siècle, les cosaques atteignirent le fleuve Ienisseï (Krasnoïarsk, aujourd’hui la plus grande ville sur ce fleuve, a été fondée en 1628),  puis quelques années plus tard, le lac Baïkal ! En 1648, Simon Dejnev découvrait le point le plus oriental du continent asiatique, dans la péninsule de Tchoukotka (donnant ainsi son nom au cap Dejnev, qui fait face au cap Prince-de-Galles en Alaska, situé à 82 km, de l’autre côté du détroit Béring).

Aux XVIIe et XVIIIe siècles, les Russes qui émigraient en Sibérie étaient des chasseurs et des personnes fuyant la Russie tsariste : des paysans fugitifs à la recherche d’une vie sans servage, des évadés de prisons, des vieux-croyants (des orthodoxes refusant les réformes menées dans l’Eglise au XVIIe siècle). Le peuplement de la Sibérie a fortement été impulsé par la construction des lignes ferroviaires transsibériennes à la fin du XIXe siècle. C’est a cette époque que se développèrent les grandes villes, dont Novossibirsk, fondée en 1893 près du pont ferroviaire enjambant le fleuve Ob.

La Sibérie compte aujourd’hui près de 40 millions d’habitants.

Petit événement aujourd’hui. A notre arrivée à Novossibirsk, nous sommes accueillis par un nouvel équipage. Eric Le Duff et Elouan Le Berre nous ont rejoints pour suppléer nos vaillants conducteurs, Bruno Owczarek et Eric Le Quéré. C’est la fin de la route pour eux et le retour en Bretagne pour un repos bien mérité. Merci à eux deux ! Changement d’accompagnatrice aussi à Novossibirsk : Arina Sukhoteplaya rentre aussi en Bretagne, à Rennes. Elle est remplacée par Anna Skovorodina qui a déjà accompagné la croisière routière dans son intégralité, de Brest à Vladivostok, de l’Atlantique au Pacifique, en 2017. Avec notre guide Margarita et notre logisticien Vitaly, nous sommes entre de bonnes mains !

Changement d’équipage à Novossibirsk (de gauche à droite : Eric Le Quéré, l’accompagnatrice Arina Sukhoteplaya, la guide Margarita Pouzeeva, et Bruno Owczarek).

Changement d’équipage à Novossibirsk (de gauche à droite : Eric Le Quéré, l’accompagnatrice Arina Sukhoteplaya, la guide Margarita Pouzeeva, et Bruno Owczarek).

Omsk, Michel Strogoff et Ivan Ogareff

Mardi 4 juin 2019 – Nous sommes à Omsk pour toute la journée, un moment de découvertes et de détente avant la longue étape qui nous attend demain pour rejoindre Novossibirsk.

Omsk, dont le nom nous replonge naturellement dans les aventures de Michel Strogoff. Né à Omsk par la grâce de Jules Verne (d’un père chasseur d’ours !), Michel Strogoff entre dans le corps des courriers du tsar, à l’âge de 25 ans, avec le grade de capitaine. A l’invasion tatare de la Sibérie, le tsar lui confie la mission de transmettre une requête au grand duc qui se trouve à 5500 km de Moscou, à Irkoutsk, près du lac Baïkal. Le roman narre son long périple, semé d’embûches. Il va ainsi traverser la Russie d’Ouest en Est, rencontrer de redoutables personnages, et déjouer de nombreux pièges. Ceux notamment du traître russe Ivan Ogareff, qui dirige la garnison d’Omsk et qui s’est mis au service de Féofar-Khan, le chef des tatars.

Omsk est la ville de Michel Strogoff.  Elle n’est pourtant pas la plus connue des étapes de notre voyage. Septième ville de Russie (1,2 million d’habitants) et deuxième de Sibérie, fondée en 1716, Omsk a été pendant presque un siècle la capitale de la Sibérie occidentale, statut qu’elle a perdu au profit de Novossibirsk en 1921. Située sur la rive droite de l’Irtych (4248 km, affluent de l’Ob !), à une centaine de kilomètres du Kazakhstan, la ville est aujourd’hui un centre industriel majeur. Omsk est aussi une ville qui conserve un centre historique, avec de belles demeures des XVIIIe et XIXe siècles, alignées notamment le long de l’avenue Lénine. Le joyau de la ville est la cathédrale de la Dormition, consacrée en 1898. Détruite par les soviétiques en 1935, elle a été rebâtie à l’identique entre 2005 et 2007. Elle est considérée comme un des plus beaux exemples d’architecture russe.

La démesure sibérienne

Lundi 3 juin 2019 – Depuis que nous avons franchi l’Oural jeudi 30 mai, depuis que nous sommes en Asie, nous sommes entrés dans une autre dimension, un monde à une échelle qui n’est pas tout à fait celle à laquelle nous sommes habitués, nous, Européens. Nous sommes désormais dans le pays de la démesure.

Avec plus de 13 millions de km², la Sibérie représente 77 % de la surface de la Russie et couvre 24 fois la superficie de notre chère France. 7375 km séparent Ekaterinbourg, la première ville sibérienne sur notre itinéraire, de Vladivostok, notre étape ultime, sur le Pacifique (7375 km, par la voie routière la plus directe !). Pour faire une comparaison, 7375 km, c’est 5 fois la distance routière la plus longue en France métropolitaine (1501 km, du Conquet dans le Finistère, à Menton dans les Alpes-Maritimes).

La Sibérie Occidentale, que nous découvrons aujourd’hui entre Tobolsk et Omsk (685 km), présente un relief relativement plat (avec des altitudes qui dépassent rarement les 100 mètres) et offre une alternance de taïgas épaisses et de terres agricoles, mal drainées, truffées de lacs et de marécages.

Dans une grande partie de la région le sol est gelé en permanence à faible profondeur (c’est ce qu’on appelle le pergélisol), ce qui contribue à accentuer le phénomène de stagnation des eaux en surface et contribue à la pauvreté des sols. Seul le Sud de la Sibérie Occidentale est constitué de terres particulièrement fertiles.

Après une pause déjeuner à Ichim, à seulement 95 km de la frontière du Kazakhstan, nous faisons étape pour 2 nuits à Omsk. Nous sommes dans le bassin de l’Irtych, une rivière de 4200 km, une longueur qui symbolise parfaitement toute la démesure sibérienne !