Tobolsk, le Kremlin des Cosaques

Dimanche 2 juin 2019 – Nous quittons ce matin Tioumen en suivant la rivière Toura. Direction Tobolsk, petite ville oubliée de Sibérie Occidentale, fondée en 1587 par les Cosaques et qui fut, jusqu’en 1830, capitale administrative de la Sibérie.

Ville historique, Tobolsk a souffert d’être restée à l’écart de la ligne ferroviaire transsibérienne construite à la fin du XIXe siècle. Elle ne compte aujourd’hui que 100.000 habitants, ce qui en fait une petite ville en comparaison avec ses voisines Tioumen et Omsk.

Tobolsk possède le seul kremlin construit au-delà de l’Oural, bâti au début du XVIIIe siècle par les Cosaques. Le seul kremlin de Sibérie et l’un des douze que compte encore la Russie aujourd’hui, le 7e sur notre itinéraire, après celui de Novgorod, de Moscou, de Rostov-le-Grand, de Souzdal, de Nijni-Novgorod et de Kazan.

Notre itinéraire de Tioumen à Tobolsk passe par Pokrovskoïe, une bourgade qui a vu naître en 1869 l’un des personnages les plus influents et les plus controversés des dernières années de la Russie impériale, Grigori Raspoutine. Son histoire étonnante est celle d’une improbable ascension sociale, celle d’un moujik de Sibérie qui réussit à s’installer au palais impérial à Saint-Pétersbourg, à la fois comme guérisseur du tsarévitch et comme confident de la tsarine Alexandra.

A Tioumen, pour remettre les gaz

Samedi 1er juin 2019 – Nous voici à Tioumen ce midi, après avoir parcouru, sur les routes de Sibérie, les 330 km qui nous séparent d’Ekaterinbourg. Nous sommes désormais dans une « autre » Russie, plus provinciale, de plus en plus éloignée du centre névralgique (et donc du pouvoir politique et économique) du pays. Moscou est désormais à 2114 km.

Tioumen est excentrée. La ville est pourtant un des poumons économiques de la Russie. Son destin a changé en 1948 avec la découverte d’importants gisements de pétrole dans la région. Le boom économique qu’elle a généré dans les années 50 et 60, a entraîné un rapide développement démographique, qui se poursuit encore aujourd’hui, très rapidement même (en 2013, la ville comptait 634.000 habitants contre 542.000 en 2006). Tioumen est l’eldorado pour de nombreux Russes qui viennent chercher ici des salaires bien plus élevés que dans le reste du pays. Si les gisements d’hydrocarbures sont répartis dans tout l’oblast de Tioumen, un territoire vaste comme 3 fois la France, s’ils sont donc parfois très éloignés, les grandes compagnies russes, Youkos, Gazprom ou LUKoil, ont leurs bureaux à Tioumen où travaillent notamment de nombreux scientifiques. Ce qui en fait aujourd’hui la ville de Russie ayant les plus hauts revenus par habitant.

Ekaterinbourg, le destin tragique des Romanov

Vendredi 31 mai 2019 –  C’est en Asie que nous nous levons ce matin, à Ekaterinbourg, nommée en l’honneur de l’épouse de Pierre-le-Grand, l’impératrice Catherine. La ville fut fondée en 1723 dans le prolongement de la route Moscou-Kazan, à proximité d’un des cols les plus bas franchissant l’Oural. L’Oural tout proche offrant d’importantes ressources minières (minerai de fer et de charbon notamment), Ekaterinbourg devint alors le centre de l’industrie métallurgique de la Sibérie.

Aujourd’hui, Ekaterinbourg, appelée Sverdlovsk pendant toute la période soviétique (de 1924 à 1991), est, avec 1,4 million d’habitants, la 4e ville de Russie après Moscou, Saint-Pétersbourg et Novossibirsk.

Ekaterinbourg tient une place particulière dans l’Histoire de la Russie. Pendant la Révolution russe, Nicolas II, qui avait abdiqué en mars 1917, fut déplacé en Sibérie, à Tobolsk, pour le mettre à l’abri des débordements à Saint-Pétersbourg. La victoire bolchévique transforma son exil à Tobolsk en détention à partir de mai 1918, à la villa Ipatiev à Ekaterinbourg. C’est dans cette maison que le dernier tsar, Nicolas II, la tsarine Alexandra, leurs filles Maria, Olga, Tatiana et Anastasia, ainsi que le tsarévitch Alexis, furent exécutés dans la nuit du 16 juillet 1918. Leurs dépouilles furent transportées à quelques kilomètres de là, pour être brûlées. A cet emplacement, aujourd’hui appelé Ganina Yama, ont été construites, en 2000, 7 chapelles, une pour chacun des membres de la famille impériale assassiné. Quant à la maison Ipatiev, le théâtre du drame, elle fut détruite en 1977, une destruction menée par un certain Boris Eltsine, alors Premier secrétaire du parti communiste de Sverdlovsk. A son emplacement, a été élevée la monumentale église de Tous-les-Saints (ou église du Sauveur) qui commémore la canonisation des Romanov par l’église orthodoxe russe en 2000.