Les archers de Gengis Khan

Lundi 17 juin 2019 – Dernière journée en Mongolie avant de retrouver l’immensité sibérienne demain. Nous visitons ce matin à Oulan Bator le monastère bouddhiste de Gandan (de son nom complet monastère de Gandantegchinlin), un des rares monastères de Mongolie à avoir maintenu son activité pendant la période communiste. Dans les années 1930, sous la pression insistante de Staline, le « régime » détruisit plus de 700 monastères dans tout le pays et fit massacrer plus de 10 000 moines bouddhistes. Gandan ne fut fermé que de 1938 à 1944.

Ouvert en 1809, il est depuis sa fondation le principal centre d’enseignement bouddhique en Mongolie. Plusieurs centaines de moines y résident aujourd’hui. Environ 50 % des Mongols sont bouddhistes tibétains (40 % se déclarent athées, 6 % chamanistes ou chrétiens, et 4 % musulmans).

Nous quittons non sans regret Oulan Bator pour parcourir de nouveau les verdoyantes steppes mongoles, jusqu’à Darkhan, la deuxième ville du pays. Une pause bucolique organisée par notre guide Orkhon nous permet de nous initier au tir à l’arc, dans les majestueux paysages de steppes.

Les concours d’archers font partie des trois sports traditionnels mongols avec les courses de chevaux à travers la steppe et les combats de lutte. Les compétitions de tir à l’arc sont une tradition très ancienne qui remonte à Gengis Khan qui l’avait institué afin de sélectionner ses archers les plus adroits. Les compétiteurs utilisent des arcs en bois dont le fil est fabriqué à partir de tendons d’animaux et des flèches créées à partir de branches d’arbres et de plumes d’oiseaux. À noter que l’épreuve de tir à l’arc est désormais ouvertes aux femmes. Les hommes se tiennent à 75 mètres de la cible (60 mètres pour les femmes) et tirent 40 flèches en tout (20 pour les femmes). Une vocation est peut être née aujourd’hui dans les steppes ! De très beaux souvenirs en tout cas !

La Mongolie, coincée entre deux puissants voisins

Dimanche 16 juin 2019 – Après avoir bâti au XIIIe siècle, sous l’impulsion de Gengis Khan, le plus vaste empire terrestre jamais constitué, la Mongolie a connu un long déclin, jusqu’à disparaître et devenir partie intégrante de l’empire chinois des Qing au XVIIe siècle. Privés de leur indépendance, les Mongols ont profité de l’effondrement de la dynastie des Qing au début XXe siècle pour proclamer à nouveau leur indépendance, en 1911. Pour faire face aux Chinois, ils se sont alors rapprochés de la Russie, ce qui les a conduits à adopter un mode de développement socialiste dès 1924 et à faire de leur pays un satellite de l’Union soviétique (1922-1991).

La chute du mur de Berlin a permis la révolution mongole de l’hiver 1989-1990, une révolution sans un seul coup de feu. L’indépendance politique retrouvée, la Mongolie est passée, dans les années 90, d’une économie planifiée à une économie de marché, par ce qu’on a appelé une « thérapie de choc ». Les transformations économiques et sociales ont été douloureuses pour la population, mais la Mongolie a réussi sa mutation, aussi bien sur le plan démocratique (les élections ont permis de régulières alternances politiques alors que des régimes forts se sont installés dans la plupart des anciennes Républiques de l’URSS), que sur le plan économique. Le sous-sol mongol abrite, il est vrai, des ressources minières très importantes (certains voudraient rebaptiser avec humour le pays la « Mine-golie »). Le sous-sol mongol est connu pour l’abondance et la diversité de ses ressources (charbon, or, cuivre et autres minerais et métaux rares), mais aussi pour leur facilité d’exploitation qui les rend particulièrement rentables. Les multinationales du secteur minier s’intéressent de très près à la Mongolie qui fait figure de nouvel eldorado.

Politiquement soumise à l’URSS pendant des décennies, la Mongolie est désormais économiquement très dépendante de la Chine qui est devenue l’unique débouché (ou presque !) de ses matières premières. Une situation qui constitue une vulnérabilité stratégique majeure, alors que le pays n’a plus les garanties de sécurité que lui apportait l’URSS. La Mongolie doit désormais assurer seule son indépendance et composer avec ses deux puissants voisins. Ses marges de manœuvre ne sont pas très grandes même si elle a signé des accords d’amitié avec les deux pays.

Après une parenthèse champêtre dans la steppe, au parc national de Gorkhi-Terelj, nous retrouvons aujourd’hui toute l’agitation d’UB (le surnom donné par les mongols à leur capitale Oulan Bator). Autre facette de la Mongolie, nous y visitons un atelier de tissage de cachemire, le pays assurant, avec la Chine, 90% de la production mondiale.

Un grand bol d’air en Mongolie

Samedi 15 juin 2019 – C’est une escapade nature qui nous attend aujourd’hui dans les steppes de Mongolie, à la rencontre des bergers nomades de la région de Gorkhi-Terelj, dont les magnifiques paysages lui ont valu d’être classée parc national.

Ce parcours à travers les steppes nous permet de découvrir la monumentale statue de Gengis Khan, construite en 2008, à l’occasion du huit-centenaire de la création de l’empire mongol, et en l’honneur de son fondateur. 250 tonnes d’acier inoxydable, 40 mètre de haut ! Le lieu est étonnant, la statue incroyable.

En plus de verdoyants paysages de petites montagnes au relief très doux, la région de Gorkhi-Terelj, à seulement 80 km d’Oulan Bator, permet une plongée dans la réalité sociale et économique du pays, et notamment de vivre au plus près des Mongols dont le pastoralisme est le mode de vie depuis des siècles. Un mode de vie en danger notamment à cause du dérèglement climatique, les steppes de Mongolie étant régulièrement touchées par des hivers anormalement froids, ce qu’on appelle ici le phénomène du « dzud », le grand froid qui entraîne une surmortalité du cheptel. Ce fut le cas par exemple pendant l’hiver 2015-2016 au cours duquel plus d’un million de têtes (sur les 55 millions que compterait le pays) périrent des températures extrêmes.

Cette journée nature à Terelj nous permet aussi de vivre l’expérience unique d’une nuit sous la yourte,  que les Mongols appellent « ger », parfaitement adaptée à leur mode de vie et au climat rigoureux des steppes et du désert de Gobi. Un moment inoubliable, au calme, loin de l’agitation d’Oulan Bator que nous retrouverons demain.